et si le serveur lâchait, serais-je encore poète?
si soudainement on coupait
l’Internet dans le monde entier
qui entendrait encore un écho de moi?

j’aimerais qu’on promulgue une loi
interdisant la poésie dans les lieux publics
qu’on aille dans les endroits spécialement conçus
équipé d’un crayon et d’une feuille de papier
écrire juste pour soi
comme si la poésie était une alliance
ou une promesse d’amour

j’ai blessé mon âme sur le papier
dans une mare de mots
tu l’appelles cliché,
déchet ou tout simplement logorrhée

alors que la poésie est un passage piéton
entre la vie et la mort
ou un sanglier pourchassé par des plombs
dans une forêt vierge

ce que j’écris n’est pas juste un loisir
mais une dédicace à Dieu
qui met parfois sa main sur ton front, femme

même si la vie ressemble à l’hôpital
où les gens sont soignés
par des pilules de mépris
tandis que la mort inventorie
des âmes

si l’Internet lâchait
je marcherais pieds nus dans la poussière
pour sentir les corps froids de mes ancêtres
ou je me raserais la tête
pour que personne ne s’aperçoive
à quel point c’est beau quand il neige

je renoncerais à cette causerie
et je te mettrais un coup de pied
là où ce serait le plus sensible
le choc te prouverait
à quel point je t’aime

je suis né sur Google
le monde entier le sait
et je cherche encore et encore
l’endroit où je pourrais
me confesser