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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2004-12-18 | [This text should be read in francais] |
Le tango, évolution poétique ?
La première image que l’on se représente du tango est celle d’une danse sensuelle et provocante venue d’Argentine. Aujourd’hui, le tango est un symbole de spectacle, de compétition, parfois à la limite de l’acrobatie, de par ses troupes professionnelles qui parcourent le monde. Pourtant, le tango, né à la fin du XIXème siècle, a été longtemps considéré comme une danse indécente par la haute société argentine. Il est devenu, de nos jours, un argument touristique et scénique, ce qui l’éloigne de l’ambiance dans laquelle il a évolué à ses origines. Le tango est non seulement cette danse fascinante et passionnée, mais aussi musique. A Buenos Aires sous l’impulsion d’Astor Piazzola, il connaît une rapide évolution vers la musique de concert. Qu’en est-il des paroles de tango ? En Argentine, elles ont été longtemps considérées comme le fruit de la classe populaire, et laissées en marge de la vie littéraire de Buenos Aires. Certes bon nombre d’auteurs de tango ont produit des paroles médiocres, mais n’en est-il pas de même pour certains auteurs de poésie ? C’est en allant au cÅ“ur du tango, de ses origines, en essayant de comprendre pourquoi il est resté si longtemps en retrait de la vie littéraire à Buenos Aires que l’on peut discerner ses évolutions sur le plan littéraire et, pourquoi pas, poétique. Naissance du tango argentin Le tango est naît en 1898, dans les bas fonds, les bordels, les bars louches et les lupanars crasseux de Buenos Aires et de Montevideo, près du Rio de la Plata. Dans ces quartiers populaires où se côtoient les émigrés (notamment de souche italienne et espagnole) et les gauchos argentins. Il raconte des histoires de couteaux, les aventures des vauriens et des souvenirs douloureux. Les auteurs sont souvent des anonymes. A travers la danse, les classes populaires s’extériorisent et oublient les difficiles conditions de vie de cette époque. Les émigrés avaient nourri beaucoup d’espoir avec leur arrivée en Argentine. On leur avait promit de la terre et de l’argent. Or en arrivant, la réalité est toute autre. La terre est déjà partagée entre quelques-uns uns. Au début du XXème siècle, le Tango est défini comme une musique marginale, musique de la zone et des faubourgs miséreux, une danse canaille, lancée par des machos querelleurs, sans intérêt et donc le Tango est mal considéré par la bonne société Argentine. Ce n’est que lorsque le tango est devenu une mode à Paris et à Londres, propagé par les marins dès 1910, que les Argentins commencent à légitimer la musique et la danse du tango en l’installant dans les beaux quartiers vers les années 1910. Quand le tango chanson fait son apparition, les principaux thèmes sont la tristesse, la nostalgie de ce qui est perdu, l’abandon, la trahison. La mère, la guitare et le bandonéon sont souvent évoqués également. Le tango est une plainte de l’âme en peine, une lamentation mélancolique. Au niveau du vocabulaire, qui est qualifié de lunfardo, les tanguistes emploient celui des souches populaires, le langage de la " zone ". Par exemple, les paroliers n’hésitent pas à utiliser des termes grossiers tels que " mina " (qui désigne une prostituée) ou bien cojones (qui désigne les testicules), " morfar " (bouffer), etc. Cette langue est née du mélange d’immigration et du monde rural argentin. Pour toutes ces raisons, les littéraires de Buenos Aires ne considèrent pas les paroles du tango comme de la littérature ni de la poésie. Et pourtant, si au départ sa danse et sa musique sont mal vues, celles-ci atteignent rapidement les quartiers chics de la capitale suite à l’effet de mode parisien. Contrairement aux paroles qui restent longtemps en retrait de la vie culturelle argentine. Si l’on peut parler de vers dans le tango, ils ne sont traditionnellement pas rimés. La rythmique de ses paroles suit souvent l’exemple de sa musique avec dans la plupart des temps le schéma 1.2.3.4/1.2/1.2 et le temps fort est sur le 4. Évolution du " tango chanson " Quand le tango commence à pénétrer dans les salons chics de Buenos Aires, il n’était plus acceptable que les paroles de tango soient de simples refrains de lupanars. Il fallait que les textes soient adaptés pour les gens de ces quartiers. La transition est ainsi assurée par Pascual Contursi. Il est sans contexte le précurseur dans ce domaine. Certain disent qu’il est le premier auteur des paroles de tango " El hacedor del tango ", c’est à dire " le créateur du tango chanson ". Contursi change fondamentalement l’esprit des paroles de tango. Le tango devient " argumenté ", il raconte une véritable histoire. Il met en place les véritables fondements de la poésie tanguera. Contursi est né en 1888 à Chivilcoy dans la pampa argentine. Il connu un succès croissant à Montevideo, à Buenos Aires puis en Europe où il vécut en France et en Espagne. Début 1932, Gardel se charge de le rapatrier en Argentine où Contursi mourut dans un asile le 29 mai, atteint de folie. Dans Mi noche triste (Ma triste nuit), l’auteur en s’adressant au " tu " et implique le " je ". Il introduit ainsi deux personnages et le ton du texte, entre reproche et nostalgie. Par la suite, Contursi ne fait qu’intensifier le reproche en rappelant le passé et ses sentiments pour la femme qui l’a abandonné. Dans les trois derniers couplets, il argumente sa peine en dressant les images de sa désillusion. Il utilise des images fortes, comme ce miroir qui aurait pleuré le départ de son amour, celle de la guitare et de la lampe pour renforcer l’idée de l’abandon et de la désillusion. Contursi est le premier lettriste de tango à donner à ses textes une véritable structure, un sens, à argumenter ses paroles. MI NOCHE TRISTE (1915) Percanta que me amuraste En lo mejor de mi vida, Dejándome el alma herida Y espina en el corazón, Sabiendo que te querÃa, Que vos eras mi alegrÃa Y mi sueño abrasador, Para mà ya no hay consuelo Y por eso me encurdelo Pa’ olvidarme de tu amor. De noche cuando me acuesto No puedo cerrar la puerta, Porque dejándola abierta Me hago illusión que volvés. Siempre llevo bizcochitos Pa’ tomar con matecitos Como si estuvieras vos, Y si vieras la catrera Cómo se pone cabrera Cuando no nos ve a los dos. Cuando estoy en mi cotorro Lo veo desarreglado, Todo triste, abandonado, Me dan ganas de llorar. Me detengo largo rato Campaneando tu retrato Pa’ poderme consolar. Ya no hay en el bulÃn Aquellos lindos frasquitos Adornados con moñitos Todos del mismo color. Y el espejo está empañado Y parece que ha llorado Por la ausencia de tu amor. La guitarra en el ropero TodavÃa está colgada : Nadie en ella toca nada Ni hace sus cuerdas vibrar. Y la lámpara del cuarto También tu ausencia ha sentido Porque su luz no ha querido Mi noche triste alumbrar. Letras de tango, selección (1897 – 1981) José Gobello, Centro editor de cultura Argentina, page 40 MA TRISTE NUIT Toi qui m’as abandonné En plein bonheur, Tu m’as laissé l’âme blessée, Une épine au cÅ“ur. Tu savais que je t’aimais, Ni ma joie ni mon rêve Ne comptaient pour toi… Je ne peux plus me consoler Et je me suis soûlé Pour oublier ton amour. La nuit quand je me couche, Je ne peux pas fermer la porte, Alors elle reste ouverte Et je me donne l’illusion de ton retour. J’apporte toujours des biscuits Pour prendre avec le maté Comme quand tu étais là ; Et si tu voyais le lit Comme il est tout retourné De ne plus nous voir ensemble. Quand je rentre dans la chambre Je la retrouve en désordre, Toute triste, abandonnée, Elle me donne envie de pleurer, Et je passe un long moment A contempler ta photo Pour pouvoir me consoler. Il n’y a plus dans la chambre Ces jolis flacons Décorés de petits rubans Tous de la même couleur, Le miroir est terni, Comme s’il avait pleuré Le départ de ton amour. La guitare dans la penderie Reste à sa place ; Personne ne chante avec elle, Personne ne touche ses cordes… La lampe dans la chambre Ressent aussi ton départ, Sa clarté ne veut pas Eclairer ma triste nuit. Traduction proposée par Henry Deluy dans l’anthologie Tango, présentée par Henry Deluy et Saul Yurkievich, aux éditions P.O.L, page 85 Par la suite, d’autres auteurs de paroles de tango ont contribué à l’évolution du tango chanson lui donnant ainsi une nouvelle forme, et le personnalisant. C’est le cas, pour commencer, de Enrique Santos Discépolo. Il est caractérisé comme le parolier le plus déterminant de la décennie " infâme " (1933-1943), période de déséquilibre économique et moral. Discépolo traite des sujets tels la solitude, le désespoir, le fracas, la révolte et surtout une vision sceptique du monde. Il élève les thèmes classiques du tango (désamour, trahison) à une dimension plus humaine et déchirante. Ainsi dans les paroles de Discépolo, on ressent une critique à double tranchant sur le plan de la crise économique comme de la crise morale. Il exprime sa rage, son désir que l’homme soit à sa place pour avoir sa part d’humanité. C’est le tango de " l’homme qui pense " ou comme certains l’appelle " la philosophie de Discépolo ". Son style est direct. Il n’hésite pas à prendre la parole à la place de ses héros désemparés et désespérés. Il dit : " le tango est une pensée triste qui se danse ". Lorsqu'on demande à Discepolo d'expliquer comment il écrit ses tangos, il répond : "À l'origine d'un tango, il y a toujours la rue, et c'est pourquoi je marche dans la ville en essayant d'en pénétrer l'âme, en imaginant au plus profond de moi ce que tel homme ou telle femme qui passent souhaiteraient entendre ou ce qu'ils pourraient chanter à un moment heureux ou malheureux de leur vie [...]. Le personnage de mes tangos, c'est Buenos Aires, c'est la ville. Un peu de sensibilité et un peu d'observation ont inspiré toutes les paroles que j'ai écrites." Il obtient son premier succès avec le tango Esta noche me emborracho (Cette nuit je me suis soûlé) en 1928. Yira… Yira est sans contexte l’un des plus grands textes de Discepolo. C’est aussi celui dans lequel il laisse le plus transmettre son côté septique et désespéré. Yira... yira (1930) Cuando la suerte qu'es grela, fayando y fayando te largue parao; cuando estés bien en la via, sin rumbo, desesperao; cuando no tengas ni fe, ni yerba de ayer secandose al sol; cuando rajés los tamangos buscando ese mango que te haga morfar... !La indiferencia del mundo - que es sordo y es mudo - recién sentiras! Veras que todo es mentira, veras que nada es amor, que al mundo nada le importa... !Yira!... !Yira!... Aunque te quiebre la vida, aunque te muerda un dolor, no esperes nunca una ayuda, ni una mano, ni un favor. Cuando estén secas las pilas de todos los timbres que vos apretas, buscando un pecho fraterno para morir abrazao... Cuando te dejen tirao después de cinchar lo mismo que a mi. Cuando manyés que a tu lao se prueban la ropaque vas a dejar... !Te acordaras de este otario que un dia, cansado, se puso a ladrar!... RODE, RODE Yira... Yira Quand la chance, cette coureuse, Abat ses atouts et te laisse tomber, Quand tu es bien sur la voie, Désespéré, sans but, Quand tu n’as plus ni foi, Ni maté de la veille, Séchant au soleil… Quand tu uses tes godasses A chercher du fric Pour bouffer… Tu ressentiras L’indifférence du monde, Sourd et muet. Tu verras que tout est mensonge, Tu verras que rien n’est amour, Que le monde s’en fout, Rôde, rôde… Bien que la vie te brise, Bien que te morde une douleur, N’attend jamais de l’aide, Ni une main… ni une faveur. Quand les piles sont déchargées De toutes les sonnettes Que tu tires… A la recherche d’un cÅ“ur fraternel Pour mourir… embrassé… Quand on te laisse tomber, Après avoir fait ceinture Comme ça m’est arrivé. Quand tu piges qu’à côté de toi, On essaye les fringues Que tu vas quitter, Tu te souviendras de cet idiot Qui, un jour, fatigué, S’est mis à aboyer. Traduction proposée par Henry Deluy dans l’anthologie Tango, présentée par Henry Deluy et Saul Yurkievich, aux éditions P.O.L, page 193 Un autre grand nom du tango c’est Catulo Castillo. Sa particularité est son interprétation de la nostalgie, de la plainte douloureuse du passé, thème déjà abordé par la plupart des auteurs de tango. Mais ce qui le distingue, c’est que dans ses textes la douleur est le prétexte à la recherche de l’essence même des choses dans l’espace temporel. De l’analyse des paroles de Catulo Castillo, certaines constantes se retrouvent souvent : l’absence, la recherche de ce qui semble être caché, perdu, la rencontre, celle qui ne dure qu’un instant ou bien la recherche continuelle de ce qui est absent. Catulo Castillo emploie des notions qui pourraient paraître abstraites mais qui sont des éléments de la vie de tous les jours (le café, le patio, les lieux de Buenos Aires…) En réalité, ces métaphores sont à interpréter comme le symbole de l’âme, des sentiments et des émotions. Sa poésie est celle d’un monde intérieur qui affronte les dures réalités de l’extérieur. Il relève les conflits intérieurs humains pour construire l’identité de l’homme vivant parmi les désordres du monde. Il vise donc à démontrer les difficultés de l’homme dans sa recherche métaphysique. De plus pour accentuer ces difficultés, Catulo Castillo n’hésite pas à créer des unités rythmiques et d’user de la répétition, des allitérations de la rime et des jeux de mots. 'Tinta roja' Paredon Tinta roja en el gris del ayer, Barboton de mi sangre infeliz Que verti en el malvon D'aquel balcon Que la escondia. Yo no se Si fue el negro de mis penas Fue el rojo de tus venas, Mi sangria. Porque ella llego y se fue Tras del carmin De aquel fondin lejano£ Donde lloraba un tano Sus nostalgias en bon vin. Donde estara mi arrabal ? Quien se robo, mi niñez ? En que rincon, luna mia, Volcas como entonces. Tu clara alegria ? Veredas que yo pisé, Malevos que ya no son, Bajo tu cielo de raso, Trasnocha un pedazo De mi corazon. tangodesoie 'Encre rouge' Pan de mur, Encre rouge sur le gris du passé, Bouillonnement de mon sang accablé Que je versais parmi les fleurs Dans ce balcon Où elle se cachait. Je ne sais pas Si ce fut le noir de mes peines Ou le rouge de tes veines, Qui saignait. Parce qu'elle arriva et s'éloigna Suivant le carmin De ce lointain troquet Ou un italien pleurait Ses tristesses dans le vin. Où est mon quartier ? Qui m'a volé mon enfance ? Au coin de quelle rue Verseras ce soir, ma lune. Ta joyeuse clarté ? Trottoirs que j'ai foulés Visages qui ne sont plus Sous le satin de ton ciel, Découche pour toujours Un morceau de mon cÅ“ur Traduction de A. Epstein Le dernier poète, dont je souhaite vous parler, a été connu du public en 1967 avec son Å“uvre Romancero canyengue, il s’appelle Horacio Ferrer. Avec des images inspirées du surréalisme français, des sonorités provocantes et innovantes et une langue inventée, Ferrer est sans contexte un révolutionnaire ! Il invente les mots " tangamente ", le meilleur mot qu’il soit pour exprimer la nostalgie et la mélancolie triste à mourir. Surtout, il devient l’ami d’Astor Piazzola, le grand maître de la musique tango, et ensemble ils composent musique et paroles. Le duo va remettre profondément en cause la forme traditionnelle du tango, intégrant dans un même tango différentes formes rythmiques (Balada par un loco, intègre valse et tango). Il donne au tango une autre dimension qui est celui de la tragédie, lui conférant ainsi des airs théâtraux. Ferrer a ainsi su se démarquer, obtenir sa propre identité. BALADA PARA UN LOCO Las tardecitas de Buenos Aires tiene ese "que sé yo", ¿viste?. SalÃs de tu casa, por Arenales; lo de siempre, en la calle y en vos... Cuando de repente, de atrás de un árbol, me aparezco yo... Mezcla rara de penúltimo linyera y de primer polizón en el viaje a venus: medio melón en la cabeza, las rayas de la camisa pintadas en la piel y una banderita de taxi libre levantada en cada mano. ¡Té reÃs...! Pero sólo vos me ves, porque los maniquÃes me guiñan, los semáforos me dan tres luces celestes y las naranjas del frutero de esquina me tiran azahares... ¡VenÃ...! Que asÃ, medio bailando y medio volando, me saco el melón para saludarte, te regalo una banderita y te digo: Ya sé que estoy piantao, piantao, piantao.. ¿No ves que va la luna rodando por Callao, que un coro de astronautas y niños, con un vals, me bailan alrededor? ¡Bailá, venÃ! ¡Volá! Yo sé que estoy piantao, piantao, piantao... Yo miro a Buenos Aires del nido de un gorrión, y a vos te vi tan triste...¡VenÃ, volá! ¡SentÃ! ¡Loco, loco, loco...! Cuando anochezca en tu porteña soledad, por la ribera de tu sábana vendré con un poema y un trombón a desvelarte el corazón. ¡Loco, loco, loco..! Como un acróbata demente saltaré sobre el abismo de tu escote, hasta sentir que enloquecà tu corazón de libertad. ¡Ya vas a ver! (Recitado) Salgamos a volar, querida mÃa; subite a mi ilusión supersport y vamos a correr por las cornisas con una golondrina en el motor, De Vieytes nos aplauden: ¡viva, viva! los locos que inventaron el amor, y un ángel y un soldado y una niña nos dan un valsecito bailador... Nos sale a saludar la gente linda; y un loco, pero tuyo, ¡qué sé yo!, provoco campanarios con la risa y al fin te miro y canto a media voz: Quereme asà piantao, piantao, piantao... Abrite los amores, que vamos a intentar la mágica locura total de revivir... ¡VenÃ, volá! ¡VenÃ! ¡Tralalalarará....! ¡Viva, viva, viva...! ¡Loca ella y loco yo..! ¡Locos, locos, locos...! ¡Loca ella u loco yo...! Letras de tango, selección (1897 - 1981) José Gobello, Centro editor de cultura Argentina BALLADE POUR UN FOU Les soirées à Buenos Aires ont un je ne sais quoi, tu vois ? Tu sors de chez toi, dans Arenales, comme toujours, dans la rue et en toi… Quand soudain, de derrière un arbre, j’apparais… Un étrange cocktail d’avant dernier trimardeur et de premier clandestin en route pour vénus : Le melon sur la tête, les rayures de la chemise peintes sur la peau Et dans chaque main un drapeau de taxi indiquant que je suis libre Tu te moques ! Mais seul toi me vois, parce que les pantins me clignent de l’oeil, Les feux rouges me donnent trois lumières célestes Et les oranges du marchand de fruits me jettent des fleurs Viens… ! Ainsi, moitié dansant moitié volant, j’ôte mon melon pour te saluer, Je t’offre un petit drapeau et je te dis : Je sais, je suis fêlé, fêlé, fêlé… Tu ne vois pas que la lune rôde autour de Callao, Qu’un chÅ“ur d’astronautes et d’enfants Dansent la valse autour de moi ? Danse, viens ! Vole ! Je sais, je suis fêlé, fêlé, fêlé… Je regarde Buenos Aires depuis le nid d’un moineau, Et je t’ai vu, si triste… Viens, vole ! Amuse-toi ! Dingue, dingue, dingue… ! Quand le soir se couchera dans ta solitude portègne* Sur le rivage de tes draps je viendrai Avec un poème et un trombone Te réveiller le cÅ“ur. Dingue, dingue, dingue… ! Comme un acrobate dément je sauterai Dans les abîmes de ton décolleté, jusqu’à sentir Que j’ai rendu ton cÅ“ur fou de liberté. Tu verras ! (Récité) Allons nous en voler, ma chère ; Grimpe à mon illusion supersport Et allons courir sur les corniches Avec une hirondelle dans le moteur, A Vieytes ils nous applaudissent : bravo, bravo ! Ces dingues ont inventé l’amour, Et un ange, un soldat et une fillette Nous offrent une petite valse… Les gens " bien " sortent pour nous saluer, Et un fou qui t’appartient, je le sais bien ! Qui fabrique des cascades de rire Et pour finir te regarde et chante à mi-voix Aime moi ainsi fêlé, fêlé, fêlé… Abrite les amours, nous allons essayer La magie totalement folle de revivre Viens, vole ! Viens ! Tralalalarara… ! Bravo, bravo, bravo ! Elle est dingue et je suis dingue ! Dingues, dingues, dingues ! Elle est dingue et je suis dingue ! *Portègne : habitants de Buenos Aires Traduction de Cécile Guivarch Ecouter Balada para un loco : elexiliodegardel Alors, que pensez-vous des paroles de tango ? Peuvent-elles être considérées à votre avis comme de la poésie ? Références bibliographies : Poéticas del tango d’Oscar Conde, marcelo Hector Oliveri Editor, Buenos Aires 2003 Tango – Une anthologie, présentée par Henry Deluy et Saul Yurkievich, éditions P.O.L, 1988 Letras de Tango – Seleccion (1897-1981) de José Gobello, Centro editor de cultura Argentina, 1999 Des liens internet : Autres références bibliographiques : tango-Dieppe Des paroles de tango El Portal del Tango Ballade pour un fou Des articles : pol editeur La salida webplaza Lunfardo Le magazine du tango argentin : Salida Des tangos à écouter : Ecoutez Off jazz autre lien Pour voir des vidéos : Pandora recherche et présentation par Cécile Guivarch pour francopolis décembre 2004 en partenariat avec Agonia France |
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