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Nos retrouvailles posthumes
poetry [ ]

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by [Célé ]

2018-10-28  | [This text should be read in francais]    | 



Je descends l’escalier, d’une balle de plomb
Jusqu’au bas de l’immeuble où je blesse l’aiglon.
De son bec, aussi dur qu’un vieux rhinocéros,
Il dévore mes chairs d’un appétit féroce.
Je lui dis : « Oust, dehors ! Va te mettre à la diète
Mais des chairs entamées je te laisse les miettes. »
L’aiglon prend son envol, tombe puis rebondit.
Dieu, que la nuit est calme, aucun moteur vrombit.
Dieu, l’aiglon est-ce l’ange aux ailes déplumées
Par la flamme vorace aux amours allumées.
La dépouille d’un chat erre dedans mes yeux.
Ciel, entend mon secours à l’écho de tes dieux.
Je m’approche du fleuve aux paupières baignées,
Comme un judas qui passe à travers la saignée.
Je fabrique un cercueil à nul autre pareil
Avec des liens de pluie et des brins de soleil.
Je donne tout pouvoir à la main gauche adroite
Pour construire pour toi un si paisible cloître
Que la rouge colère en son âme perdrait
La trace du remords, l’empreinte des regrets.
Ami, repose-toi. La tâche est accomplie.
Adieu mon compagnon. À Dieu je te confie.
Repose-toi, l’ami, dans le lit des ronfleurs.
Si ce fleuve est mon Gange aux prières en fleurs
Ne crains rien des hivers rigoureux qui approchent.
Des carcasses d’amour rôtissent à la broche.
De bûches, elles font danser les feux follets
Sur les carrés fondant des chocolats au lait.
Riches et bienheureux, de presque dix sous, rires,
D’un éclat de centime, achète le sourire
Dans la bouche courtoise ouverte au commerçant
Qui la voit se fermer tout en le remerciant,
Et le même sourire aux lèvres basanées
Se dorer de soleil… Tu vécus treize années.
Maintenant il est l’heure. Elle arrive là-bas…
De t’ouvrir avec elle un infini cabas.
Tu te couches, mon ange, et les anses de l’ombre
T’emportent, me laissant comme un tas de décombres.
S’il règne ce soir deux dieux au-dessus de l’Ain,
Ils ont créé pour toi un paradis félin.
Si le troisième, fier des sentences du juge,
À mon cadavre demain ferme le refuge,
S’il jette mon amour au vulgaire mépris
C’est que de cet amour il n’aurait rien compris.
Je cracherais « cent foi » aux vierges interdites
Mon âme noire, par quatre missels, maudite.
Je lui dirai : « Tant mieux ! » Mille fois mes hivers
Se coucheront avec des asticots de vair
Juste avant de te voir puis de m’exclamer : « Que le
Printemps de ton éden est beau. » Quand de ta gueule
Je verrai d’une tranche un fond de salami.
Alors, tu me diras : « Bienvenue, mon ami ! »

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